Dynamique socio-économique et tendances évolutives

Différents processus sont à l’origine de la situation et impacts environnementaux, sanitaires, économiques et sociaux

 

  • Les processus géomorphologiques et climatiques

Le milieu physique littoral subit l'influence de processus terrestres, marins et atmosphériques qui interagissent et participent à son évolution : la lithologie et la tectonique déterminent la sensibilité à l'érosion du littoral et des roches qui le compose ; l'hydrodynamique marine (vagues, marée, courants) est responsable du transport de sédiments sur le rivage tandis que les précipitations et l'hydrologie continentale amènent à la côte les sédiments issus de l'érosion des bassins-versants. Les cyclones, épisodes climatiques extrêmes, accentuent les effets de ces différents facteurs (houles cycloniques, crues torrentielles, etc.). À plus long terme, le réchauffement planétaire agit indirectement sur la dynamique côtière en intensifiant les tempêtes et cyclones et en provoquant une élévation du niveau de la mer qui a pour conséquence un accroissement de « l'agressivité » de l'hydrodynamique côtière.

 

 

  • Des relations historiques et culturelles avec l'homme, qui ont façonné son occupation

La société réunionnaise a très longtemps vécu en ignorant voire en se protégeant de la mer et des dangers qu'elle représentait (inondations, vagues destructrices, invasions etc). La vocation première de la bande littorale était donc de constituer un espace de protection, vocation qui s'est concrétisée par la délimitation des 50 pas géométriques en 1922. Au milieu du vingtième siècle, les atouts du littoral sont valorisés : aménagement des plaines agricoles, développement des infrastructures routières et portuaires, développement du tourisme balnéaire … Dès lors, l’État vend une partie de son domaine public maritime par portion. Pendant des décennies, l’aménagement de l'espace littoral a principalement suivi des logiques d'opportunités foncières, non coordonnées.

 

  • Un aménagement du littoral et des mi-pentes aux impacts forts et durables

L'aménagement de la bande côtière et des mi-pentes s'est historiquement réalisé sans prise en compte des impacts possibles sur le littoral et le milieu marin, ni des interactions terre – mer :

 

  • Certains aménagements lourds du trait de côte (aéroports, route du littoral) sont ainsi directement responsables d'une modification des flux sédimentaires, sources d'envasement ou d'érosion côtière.  

  • Des formes urbaines, en particulier la production d'une ville diffuse dans les mi-pentes, accentuent, par l'artificialisation des sols, les risques d'érosion, d'inondation, les transferts d'éléments vers la mer (matières en suspension, hydrocarbures, polluants), les ruptures des continuités écologiques par la fragmentation des habitats. Le développement de l'urbanisation entraîne par ailleurs une fermeture aux accès littoraux.

  • L'agriculture est source de transferts en matière en suspension (érosion des sols due à des pratiques mal adaptées), de produits organiques et de fertilisants. Le littoral concentre les activités industrielles: ville du Port, distilleries et sucreries, sources de rejets dans les réseaux collectifs ou directement en mer.

  • La fréquentation touristique et de loisir se concentre sur des zones restreintes, vite saturées (Ermitage, Saline …). Elle accentue les pressions liées à l'urbanisation et participe à la dégradation directe des lagons.

  • Les prélèvements de matériaux en rivière, interdits par la réglementation modifient les stocks sédimentaires qui alimentent et consolident les zone côtières.

  • La non-conformité du système d'assainissement, les lacunes ou le sous-dimensionnement des réseaux d'évacuation des eaux pluviales sont sources des pollutions des eaux et des sols

  • Une dégradation des coraux qui accentue les aléas naturels

 

Le milieu marin constitue l'exutoire final des eaux drainant des bassins versants de l'île dont il reçoit et accumule les éléments terrigènes et biogènes par rejet direct, ruissellement et infiltration en fonction des activités humaines qui s’y produisent. La barrière de corail déstabilisé voire fortement dégradée ne peut plus jouer son rôle de protection vis-à-vis de la houle notamment, avec des impacts renforcés sur l'érosion du trait de côte.

 

  • Des acteurs et des règles spécifiques pour une multitude d’usages

L’occupation et les usages de l'espace littoral sont multiples : résidentielle, espaces protégés, zones d'activités économiques, vocation touristique ou de loisir, pêche … Autant d’usages pour autant d’acteurs aux intérêts divergents voire contradictoires, et en tous les cas, aux responsabilités partagées. Par ailleurs, les instruments classiques (réglementation, planification spatiale) peinent à prendre en charge les enjeux du littoral, dans ces espaces fragiles, densément peuplés et souvent conflictuels.

 

Ainsi, l’État en tant que propriétaire du Domaine Public Maritime, est garant de sa conservation et du maintien de son caractère naturel. Il peut en confier la gestion à une personne publique (collectivité ou groupement de collectivité) , ou délivrer des autorisations d'occupation temporaires pour des travaux/ aménagements ponctuels. Les collectivités ont la maîtrise des travaux de protection contre les risques marins, des aménagements de loisirs du littoral (sentiers, plage…). Les établissements publics (Conservatoire de l'Espace Littoral et des Rivages Lacustres, Réserve Marine, Institut français de Recherche pour l’Exploitation de la Mer (Ifremer) …) et les associations œuvrent principalement pour la connaissance des milieux, la préservation des milieux par des outils de gestion ou de protection, la sensibilisation du public Enfin, la population peut être à la fois usager et propriétaire.

 

Cette diversité des acteurs induit parfois des conflits d’usages, et toujours, une complexité dans la gestion des projets. Ce constat a permis de faire émerger le développement de la « Gestion intégrée des zone côtière », encore appelé «  Gestion intégrée mer-littoral ». Il s’agit d’inventer de nouveaux modes de « gouvernance » du littoral, qui complètent et coordonnent les outils existants. Une première expérience a été lancée en 2006 par la Région Réunion sur le littoral Ouest et un deuxième projet est en cours de préparation, porté par le Territoire de la Côte Ouest.

 

La Région, notamment à travers le schéma de mise en valeur de la mer (SMVM de 1995 puis 2011), a permis d'organiser les usages de cet espace et de réguler les pressions, à travers des prescriptions (protection des espaces de respiration au sein de l'urbanisation et des espaces naturels remarquables). Le Schéma de mise en valeur de la mer définit les conditions de développement équilibrées de l'espace littoral et porte sur une bande allant des mi-pentes jusqu’à un mile marin (1 852 mètres), et ceci pour prendre en compte tous les enjeux liés aux interactions terre-mer.